Pouvoir d'achat, effectifs: les fonctionnaires lancent l'offensive

Les syndicats de fonctionnaires se sont réunis ce vendredi et envisagent des actions à partir de la mi-septembre. Leur contentieux avec le gouvernement porte sur deux points: les suppressions de postes et le pouvoir d'achat. Les explications de LEXPRESS.fr, avec des infographies exclusives.

La colère monte chez les fonctionnaires. Déjà, les récentes déclarations de leur ministre de tutelle, André Santini, qui jugeait la semaine dernière "pas normal que 24% de la population active soit fonctionnaire", n’avaient pas contribué à apaiser un climat déjà tendu par les annonces de suppressions d’emplois.

Vendredi, les huit organisations syndicales de la fonction publique (CGT, CFDT, FO, Unsa, FSU, Solidaires, CGC, CFTC) sont donc sorties de leur réunion commune avec la volonté d’en découdre: elles se sont déjà donné rendez-vous mi-septembre pour "débattre de la façon de mobiliser les personnels". Leur désaccords avec le gouvernement s'articulent autour de deux points principaux. 


1. Les effectifs 

Pendant la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy avait promis que la moitié des fonctionnaires qui partent à la retraite ne seraient pas remplacés. Avec 22 700 postes de moins dans le budget 2008, on est loin du compte : 33% seulement des postes ne seront pas conservés. Il n’empêche: c’est un sacré coup d’accélérateur par rapport aux années précédentes,
comme le montre notre infographie.

Pour les syndicats, la pilule est dure à avaler. "Avant que l’on décide de supprimer des postes, il faudrait avoir un vrai débat sur les missions de la fonction publique, sur la façon d’améliorer le service rendu aux usagers", indique Jean-Marc Canon, de la CGT, pour qui de nombreux secteurs souffrent d’un manque de personnel. Et de poursuivre: "Dans cette attente, nous demandons un moratoire sur les coupes dans les effectifs". Une exigence qui a peu de chances d'être entendue: lors du discours qu’il prononcera à la fin du mois, Nicolas Sarkozy confirmera en effet aux fonctionnaires qu’ils seront "moins nombreux". Mais "mieux payés". 


2. Le pouvoir d’achat 

Comprenant que le pouvoir d'achat est l'autre sujet "chaud" du moment, le président de la République a promis aux fonctionnaires qu'une partie des économies réalisées par les suppressions de postes leur serait rétrocédée sous la forme d'augmentations. "De la poudre aux yeux", pour Jean-Marc Canon. Les économies sont chiffrées à 800 millions d'euros par le gouvernement, ce qui signifie que 400 millions seraient reversés aux fonctionnaires: "ça ne représente que 0,6% de la masse salariale de la fonction publique d'Etat", déplore le responsable syndical.

Depuis 2000, les syndicats estiment que les fonctionnaires ont perdu 6% de pouvoir d’achat. Une étude de l’Insee, publiée en juillet, est venue les conforter: rien que sur l’année 2005, elle évalue à 0,9% l’amputation de leur pouvoir d’achat. Les résultats de cette étude sont contestés par le ministre de la fonction publique, André Santini.

En fait, au-delà de la controverse technique sur cette étude en particulier, syndicats et gouvernement n'arrivent pas à sortir d'un dialogue de sourds qui dure depuis des années. Les premiers se focalisent sur le point d’indice. "C’est le seul bien commun à tous les fonctionnaires", selon Jean-Marc Canon. Pour connaître le traitement d’un fonctionnaire, il suffit de multiplier l’indice qui correspond à la fonction qu’il occupe, par la valeur de ce point d’indice. Et en effet, comme le montre notre infographie, l’évolution de ce dernier est au-dessous de l’inflation depuis 2003.

Mais le point d’indice ne représente pas la totalité du salaire des fonctionnaires, qui comprend également les primes et le "glissement vieillesse technicité". Sous ce terme un peu barbare se cache la prise en compte automatique, chaque année, de l’ancienneté dans la revalorisation du traitement des agents. Comme l’a indiqué Eric Woerth, ministre du Budget et de la Fonction publique, le gouvernement refuse de "se cantonner à la seule évolution" du point d’indice et entend jouer plutôt sur les autres leviers. Ce qui fait craindre aux syndicats une évolution vers une individualisation des salaires. Pour Elisabeth David, de l’Unsa, "une telle dérive comporte un important risque d’arbitraire, qui s’observe déjà notamment dans la fonction publique territoriale".


"L'Express"




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