Retraites : Xavier Bertrand laisse deux mois à la concertation

Le ministre du Travail doit présenter les grandes orientations de la réforme des retraites aux partenaires sociaux d'ici à la mi-avril. La CGT et la FSU appellent à manifester demain. Les autres syndicats attendent que le gouvernement se dévoile.

Sortant rarement de sa réserve, Xavier Bertrand a beaucoup écouté hier au cours des huit heures de rencontres bilatérales avec les partenaires sociaux sur la deuxième étape de la réforme des retraites. Reprenant la méthode qui a fait ses preuves sur les régimes spéciaux, le ministre du Travail a recueilli leurs propositions et transmettra « une première trame [de propositions] à la mi-avril », avec pour objectif de trouver des points de convergence même si aucun syndicat ne soutiendra globalement le gouvernement. Suivra une nouvelle journée de bilatérales sur les grandes orientations de la réforme. Xavier Bertrand a expliqué qu'un délai de deux mois était raisonnable pour mener la concertation à son terme.

Les syndicats ont focalisé leurs critiques sur le passage de 40 à 41 ans de la durée de cotisation entre 2009 et 2012, considéré comme acquis par le gouvernement. Jean-Louis Malys (CFDT) a assuré que son syndicat « assumait pleinement la réforme de 2003 et le fait qu'il faudra allonger la durée de cotisation. Mais cet allongement ne devra être déclenché que quand il y aura des résultats concrets, chiffrés, sur l'emploi des seniors ». Pour Bernard Thibault (CGT), le gouvernement « doit comprendre qu'il serait risqué de mettre en oeuvre des décisions déjà prises sans qu'il y ait de débat plus large dans le pays ». D'où son appel à manifester dès demain pour obtenir de « réelles négociations ».

Prendre le pouls de la base

Si personne ne s'attend à un succès massif de cette première mobilisation, à laquelle se sont associés la FSU et Solidaires, son ampleur pèsera sur le climat dans lequel va se dérouler la réunion intersyndicale programmée lundi. Le résultat de cette rencontre est très incertain, tant les susceptibilités sont exacerbées. Elles sont de deux ordres. Il y a celles sur la réforme de 2003 : la CFDT « ne se laissera pas entraîner sur [sa] remise en cause » et n'envisage pas de mobiliser avant de connaître la feuille de route du gouvernement. « Certains syndicats demandent que la réforme des retraites soit soumise à la négociation alors qu'ils savent pertinemment qu'ils ne signeront jamais un accord. Il faut sortir de cette hypocrisie », a déclaré son secrétaire général, François Chérèque, hier dans « Challenges ».

Il y a aussi les susceptibilités liées à la réforme de la représentativité syndicale qui se profile. Ce dossier fait que les « petites » organisations - CFTC, CGC, mais aussi Unsa - n'ont pas intérêt à braquer le gouvernement. Idem pour FO, dont le leader, Jean-Claude Mailly, se situe « dans un processus de mobilisation », en attendant, là encore, que le gouvernement se dévoile.

Les syndicats vont aussi prendre le pouls de la base. Selon un sondage CSA, 61 % des personnes interrogées estiment que la durée de cotisation doit être allongée de 40 à 41 ans, laissant à penser que les Français se sont fait une raison. Mais la crise du CPE a montré que l'opinion pouvait être versatile. Et alors que le Medef a encore appelé hier à « une réforme structurelle et courageuse portant sur l'âge de la retraite », la menace d'une baisse des droits à retraite pourrait la réveiller. D'autant que le gouvernement n'est pas à l'abri d'une conjonction d'inquiétudes, les tensions salariales dans le privé pouvant se conjuguer au mécontentement croissant lié à la réforme de l'Etat.

(Les Echos)



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