Représentativité : le rappel à l'ordre de la Cour de cassation

La Cour de cassation l'a rappelé fermement : en l'absence de quorum au premier tour des élections professionnelles, tout accord d'entreprise doit être validé, comme le prévoit la réforme du dialogue social de 2004, par un référendum auprès des salariés.

Alors que les partenaires sociaux attendent toujours le document d'orientation sur la représentativité que leur a promis le gouvernement pour la fin de l'année dernière, la Cour de cassation vient de leur offrir un joli casse-tête. Un arrêt que sa chambre sociale a prononcé le 20 décembre dernier va en effet singulièrement compliquer le dialogue social.

La loi Fillon du 4 mai 2004 a imposé une condition de représentativité aux accords d'entreprise. Seuls sont valables les textes auxquels des syndicats représentant plus de 50 % des salariés ne se sont pas opposés. L'audience de chaque organisation est censée être fournie par les élections aux comités d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel. Mais à une condition : qu'il n'y ait pas besoin de deuxième tour. La Cour de cassation vient de rappeler fermement cette règle inscrite dans la réforme du dialogue social : lorsque le quorum prévu par le Code du travail « n'est pas atteint au premier tour des élections professionnelles à la proportionnelle (...), il n'y a pas lieu de décompter les suffrages exprimés en faveur de chacune des listes syndicales », précise l'arrêt. La justification de cette règle est simple : seul le premier tour de ces scrutins est réservé aux candidats des organisations syndicales reconnues représentatives, celles qui sont seules habilitées à signer des accords. Mais son résultat n'est valable que si la participation est supérieure à 50 %. Sinon, un second tour doit être organisé, où peuvent aussi se présenter des non-syndiqués.

La conséquence de cette règle de calcul de l'audience, passée inaperçue jusqu'à présent, est loin d'être négligeable. Dans toutes les entreprises où un constat de carence est dressé lors de l'élection professionnelle, même s'il ne concerne qu'un des collèges (ouvriers, employés, agents de maîtrise, cadres), tout accord conclu avec un ou plusieurs syndicats doit, depuis mai 2004, être obligatoirement validé par un référendum auprès des salariés pour pouvoir s'appliquer.

Casse-tête

Difficile de dire combien d'entreprises risquent d'être concernées, toutes ne respectant pas leur obligation d'informer le ministère de l'Emploi en cas d'absence de quorum au premier tour de leurs élections professionnelles. Mais c'est, à coup sûr, loin d'être négligeable. Il suffit pour s'en convaincre de se référer au poids - d'ailleurs de nouveau croissant - des non-syndiqués dans les résultats des élections aux comités d'entreprise : 22,4 % en 2004, toutes tailles confondues, et plus de 50 % dans les entreprises de moins de 100 salariés.

La loi a prévu une porte de sortie pour les entreprises en butte à la règle du quorum : la possibilité d'organiser des élections spécifiques de représentativité. Mais il faut pour cela que soit conclu un accord qui soit approuvé par une majorité de salariés pour entrer en vigueur...

LEÏLA DE COMARMOND - "Les Echos"
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