La Cour des comptes s’inquiète de la “fragilité” des départements

Nouvelles charges sociales, baisse des financements de l’État, ressources fluctuantes, transferts de personnels… Dans son rapport annuel, présenté le 12 février, la Cour des comptes pointe le fragile équilibre financier des départements et préconise une réorganisation de la fiscalité locale. Il y a urgence.

Le statu quo n’est pas possible.” Dans leur rapport public annuel [cliquez ici pour le télécharger], présenté le 12 février par le Premier président Didier Migaud devant un parterre de flashs et de journalistes, les magistrats de la Cour des comptes se penchent sur la situation et les perspectives financières des départements. Leur constat est sans appel : il est urgent de modifier l’équilibre financier des conseils généraux, qu’ils jugent “fragiles” et trop dépendants de la conjoncture économique.

La structure financière des départements a été “profondément modifiée” depuis les années 2000, observe la Cour, depuis que les conseils généraux assurent le versement de certaines dépenses sociales : RMI-RSA, allocation personnalisée d’autonomie (APA), prestation de compensation du handicap (PCH)… Pour ces trois allocations, l’écart entre la charge supportée et le financement de l’État représente quelque 5 milliards d’euros en défaveur des départements en 2011. Une différence qui s’est sans doute aggravée en 2012, puisque la Cour prévoit une croissance de 4,9 % des dépenses sociales assumées par les conseils généraux.

Efforts de gestion

Par ailleurs, les conseils généraux ont “accueilli” quelque 80 000 emplois liés à la décentralisation de 2004, synonymes de dépenses de personnels accrues. Autant d’éléments qui expliquent la situation financière dégradée des départements. Mais en partie seulement. “Hors effet de la décentralisation, les effectifs ont augmenté de 12 %” sur la période 2003-2011, relève le rapport annuel. Les départements, comme les autres collectivités, sont donc invités à intensifier leurs efforts de gestion.

Mais ce ne sera pas suffisant. Car si leurs charges augmentent, les départements perçoivent une fiscalité qui “tend à stagner, voire à diminuer”. Surtout, leurs ressources sont en partie liées à la conjoncture économique, notamment les droits de mutation, liés aux ventes immobilières. Et la conjoncture n’est pas bonne… Pour noircir encore le tableau, la réforme de la fiscalité locale de 2010 a réduit la capacité des départements à recourir au levier fiscal, ce qui a fragilisé encore davantage leurs finances et entraîné une limitation de leurs investissements.

Le foncier bâti des communes vers les départements ?

Alors, que faire ? D’abord réfléchir à une réallocation de la fiscalité entre les départements et le bloc communal “afin de donner aux départements une plus grande marge de manœuvre”. Dans ce sens, une part de la taxe sur le foncier bâti pourrait être attribuée aux départements “en échange” d’une part des droits de mutation confiée aux communes. Par sûr que les maires applaudissent.

Les sages proposent également :
  - L’instauration d’un mécanisme de “lissage” des droits de mutation, évitant des fluctuations importantes d’une année sur l’autre.
  - Une péréquation “plus ambitieuse” entre départements en matière de droits de mutation et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE, l’impôt qui a remplacé en 2010 la taxe professionnelle). Pour la Cour, la réponse aux difficultés des départements ne saurait être globale alors que de profondes disparités existent entre collectivités.
  - Le renforcement des responsabilités confiées aux départements dans la gestion des dispositifs d’intervention sociale. Dans leur réponse commune aux magistrats, les ministères de l’Intérieur et de la Réforme de l’État affirment “partager” cette préconisation. “Dans cette perspective, les départements seront associés à la réforme de la dépendance qui doit intervenir en 2014”, écrivent-ils.

Les ministères de Manuel Valls et de Marylise Lebranchu indiquent par ailleurs : “Au-delà de la maîtrise indispensable des dépenses et du renforcement de la péréquation, une réflexion de fond est nécessaire sur la diversification du panier de ressources fiscales des départements, dans un contexte de montée en puissance de la gestion des charges d’intervention sociale.” Puisque tout le monde est d’accord…

 

Didier Migaud demande un effort aux collectivités
Lors de la présentation du rapport public annuel de la Cour des comptes, le Premier président, Didier Migaud, a espéré la “pleine participation” du secteur local aux efforts de maîtrise de la dépense publique. “En euros constants et hors transferts de compétences, a-t-il déclaré, elles [les dépenses] ont augmenté entre 2002 et 2011 de 16 milliards d’euros pour le bloc communal, de 13 milliards d’euros pour les départements et de 7 milliards d’euros pour les régions.”

 

(Source : Acteurs publics)

 


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